1.1.21

Les jours de rien sont-ils haïssables ou sommes-nous faibles ? Sont-ils ce à quoi nous mesurons notre force ou notre absence d’elle ? J’envisage quelque chose mais ne comprends pas très bien. Est-ce que la réalité est un sous-ensemble de la fiction ? Mais alors, ne manquons-nous pas cruellement d’imagination ? Si tu traces une figure dans l’air avec le doigt, personne ne la voit sauf toi, c’est vrai, mais elle n’en est pas pour autant dépourvue de sens. N’est-il pas sensé d’en venir à préférer ces formes éthérées aux structures chargées ? Époque au discours lourd, pesanteur généralisée, où tout ce qui est léger, insaisissable, semble bon pour y échapper. Une politique ne devrait-elle pas prôner, d’ailleurs, au-delà de la révolution, l’évaporation ? Sorte d’humanité à l’état gazeux. Je rêve. J’ai du mal à rassembler mes idées. Avec les mains, je fais des gestes pour représenter les mots que je cherche sans parvenir à les trouver. Une fois le geste fait, le mot vient. À force de les entendre répéter la même chose, je me demande s’ils ne cherchent pas leurs mots, eux aussi, s’ils ne sont pas incapables de les trouver, faute de ma méthode gestuelle. Ils parlent pour trouver ce qu’ils ont à dire alors qu’il faudrait cesser de parler pour le trouver. Ce n’est pas que le sens soit immatériel, invisible, ou je ne sais trop quoi, non, c’est plutôt qu’il ne faut pas se montrer grossier : parler est une activité subtile, la pointe la plus fine de la civilisation, par laquelle tous, barbares y compris, peuvent se révéler. L’ontologie de la parole est une ontologie de l’air. L’ontologie du langage, une météorologie.