12.6.21

Qu’est-ce que je vais bien pouvoir raconter comme conneries ? me suis-je dit. Et s’il n’y a pas de quoi être fier d’une question de ce genre, ni à la penser ni à l’écrire, (mais y a-t-il jamais de quoi être fier quand on pense, quand on écrit ?), c’est ce que je me suis dit. Car, il me semble, en effet, que je me dois à la vérité dans ce journal pasintimedutout. Si ce journal l’était, en revanche, intime, ne me devrais-je pas aussi à la vérité ? Aucune idée. Y a-t-il des choses phrases que j’écrirais dans un journal intime que je n’écrirais pas dans ce journal pasintimedutout ? Sans doute. Les cahiers secrets dans lesquels j’ai tenu naguère le registre de mes rancœurs, de mes angoisses, de mes espoirs, et caetera, ces cahiers contiennent assurément des phrases que je n’ai pas écrites ici (si elles le sont là-bas, c’est aussi parce qu’elles ne le sont pas ici ; elles ne le sont pas deux fois), mais cela ne signifie pas qu’essentiellement elles ne puissent pas être ici mais seulement là-bas. Bizarre casuistique. Pourtant, ce n’était pas ce que je voulais dire. Je ne savais pas ce que je voulais dire. E, ne le sachant pas, je dis que je ne le sais pas, et caetera. Miracles délétères de la métactivité. Il fait chaud aujourd’hui. Et d’autant plus, c’est mon impression (est-elle vraie, est-elle fausse ? je ne sais, mais je sais qu’elle est sincère), d’autant plus chaud que je m’ennuie. Les gens ont beau avoir le teint halé, moi, je les trouve gris. Si gris. Ils m’agitent leurs bijoux de famille sous le nez comme de pauvres demeurés et, si je ne souris pas, ils trouvent que je ne suis pas sympa. Eut-il fallu que je me forçasse ? Chaque fois que cela m’est arrivé (et Dieu, dans son infinie clarté, Dieu sait compter les innombrables fois que cela m’est arrivé), je me suis trompé. Pourtant, je continue. Et si c’était moi, le demeuré, in fine.