13.4.22

Palinodie (sorte de). Je regrette d’avoir écrit ce que j’ai écrit hier. Non que je ne crusse pas en ce que je disais, dans une certaine mesure, à vrai dire, j’y crois encore, mais le sentiment d’une inutilité parfaite de mes propos demeure malgré mes propos eux-mêmes. D’où cette question qui revient de temps à autre : À quoi bon ? Je ne suis ni assez intelligent ni assez intéressant pour être invité sur les plateaux de télévision et être publié par les éditeurs importants. Mais non, ce n’est pas ça ; je feins de me plaindre alors que la nœud de la chose n’est pas ici. La vérité, c’est que j’ai l’esprit plein de veilles notions qui sont toutes finies, caduques, et dont il faut se débarrasser une bonne fois pour toutes (« prendre congé », disait JPC). Si elles demeurent, ou s’il me semble que je demeure attaché à elle, faut-il s’en étonner ? Nous avons tous besoin de points de repère fiables, de rochers auxquels nous arrimer, de fondations sur lesquelles bâtir. Enfin, c’est ce que nous croyons. La vérité (encore une fois ?), la vérité (encore une fois !), la vérité, c’est que, non seulement nous n’en avons pas besoin, mais surtout ces points de stabilité nous empêchent d’envisager l’avenir. Lequel nous demeure caché non du fait de sa nature, mais de la nôtre. N’est-ce pas ce que tout le monde fait : inventer des catégories où ranger les choses, les gens, les désirs, les névroses ? Cela ne sert pas à rien, non, cela sert à faire du mal, toujours plus de mal. Je crois en ce que j’ai dit hier, mais je n’aurais pas dû le dire parce que les mots ne sont pas compris, ne sont pas compréhensibles. Telle que je l’entends, la démocratie, ce n’est pas un système politique parmi d’autres, la vie démocratique, ce n’est pas aller mettre un bulletin dans une urne une fois de temps parce qu’on a peur, parce qu’on n’aime pas untel, parce qu’on en a marre, parce qu’on paye trop d’impôts, ou je ne sais trop quelle raison qui pousse les gens à accomplir cet acte suicidaire qui consiste à confier sa puissance à quelqu’un qui exerce le pouvoir à sa place, non : la démocratie, c’est le prolongement collectif de la vie individuelle, le développement commun de la vie solitaire, rien à voir, donc, avec ce qu’on pense que c’est dans les États dits libéraux dits démocratiques (et ce n’est pas parce que c’est pire ailleurs qu’il ne faut rien faire ici, comme on l’entend bien trop souvent). Mais passons, ce n’est pas grave de se tromper, ce n’est pas grave de commettre des erreurs, il faut simplement les reconnaître, je n’aurais pas dû dire ce que j’ai dit. À cette nuance près, toutefois, que cela m’aura permis de comprendre qu’il fallait que je débarrasse mon esprit de toutes ces vieilles idées qui le peuplent encore (je n’en dresserai pas la liste ici ; elle serait trop longue et non exhaustive, c’est dire), que je fasse le ménage : ces idées ne sont pas les miennes, il faut que j’ouvre et que je m’ouvre à de nouvelles perspectives.