Enfin sorti de l’état second dans lequel j’ai passé ces dernières heures. Suis-je pour autant dans un état premier ? Je n’irai pas jusque là, non. D’ailleurs, si les états seconds existent — du moins, c’est ainsi qu’on les nomme —, les états premiers existent-ils ? Rien n’est moins sûr, à la vérité. Dans les nuits de fièvre, des images difformes, étranges, fascinantes vinrent perturber un sommeil déjà fragile. Et, tout à l’heure, dans le train qui me reconduisait à Paris, ce fut cette légère formation de bave à la commissure gauche de mes lèvres, in fine, qui me réveilla. Je jetai un œil à la jeune femme assise en face de moi, celle qui avait d’opulents tatouages sur les cuisses, mais il me parut qu’elle n’avait rien remarqué. Tant mieux, me dis-je, mais je ne pus toutefois me rendormir. Et, à présent, c’est dans des forces que je n’ai pas que je puise pour écrire. Même s’il me semble que cela m’aura fait du bien de m’absenter de mon journal, de ne plus être obsédé par lui, de me dire, le plus simplement du monde : « Oh non, pas aujourd’hui, je suis trop fatigué ». Et de l’écrire, tout de même. Oui, mais c’était une forme d’écriture minimaliste, quasi inexistante. Mais passons, je ne cherche pas la contradiction ; — elle aussi est au-dessus de mes forces. Amputé de moitié — du fait de mon absence au monde —, le séjour à Marseille fut quelque peu imbécile. Mais je m’y suis senti bien. Étrangement.