La bande de lumière orange qui sépare le niveau des nuages de celui de la mer ne m’émeut pas. Je fais rouler dessus le voile des volets sans le moindre remords, dans la plus parfaite indifférence ; ce n’est pas le sublime qui ne mérite pas mon attention, mais le lieu dégradé où il trouve à s’incarner. Après avoir enfilé mon pyjama, je m’asperge d’une simple vapeur d’eau d’orange verte, et décide d’écrire cette page au lit, fatigué comme je le suis de tout de rien, de je ne sais ni qui ni quoi, d’une certaine espèce de généralité, d’une certaine forme de banalité. Dans la cuisine, un peu avant le dîner, Nelly et moi nous étions demandés si tel phénomène est normal ou s’il ne l’est pas avant de tomber d’accord sur le fait que, s’il est très probablement normal, la normalité est détestable, et nous n’en voulons pas. La haïssons, même, au contraire. Le fils de la bonne bourgeoisie avait tort, évidemment, l’enfer, ce n’est pas les autres, c’est la norme, la normalité. Qu’une chose soit ou ne soit pas, cela ne signifie pas que nous devions l’admettre, ou plutôt : cela ne signifie pas que nous devions l’aimer. Je préférerais être meilleur, mais n’y parviens pas, me traîne animal lamentable mes défauts, mes insuffisances, ma nullité. Après tout, je mérite tout ce qu’il m’arrive, tout le mal qu’il m’arrive. Quant au bien, existe-t-il seulement ? Qu’il me soit permis, ce soir, d’en douter.

Vous devez être connecté pour poster un commentaire.