27.10.21

Épuisé. Au lit. En un sens, mon corps est plus intelligent que moi : les décisions que je ne parviens pas à prendre rationnellement, il les prend physiquement. Me court-circuite donc, preuve qu’il peut se passer de moi. N’était-ce pas ce qui s’était produit, il y a plusieurs années déjà, quand j’avais arrêté de fumer ? Jamais, je crois, je n’en pris la décision conscience (chaque fois que je l’ai prise, j’ai échoué à m’y tenir) : je m’étais retrouvé cloué au lit plusieurs jours et, au réveil, je n’étais plus un fumeur. Mais alors pourquoi est-ce que je le regrette ? Parce que je préférerais être en accord avec moi-même ? Mais qui est-il, ce moi que je ne suis pas, ce corps que je suis mais qui ne me consulte pas ? Dans les interstices en pointillés des volets roulants de la fenêtre filtre la lumière du jour, invisible prisme. Tout mon corps est douloureux, mais il y a une force plus vitale au cœur de cette douleur. Voici un nouveau poème de R.A. Singleton, qui écrivait encore, lui, hier au soir cependant que moi, déjà, je sombrais :
Dans les marges de moi-même,
il y a des messages cryptés
que je ne comprends pas
et sur les écrans, des messages qui m’échappent,
et tout, tout me semble si insaisissable
comme toi, qui refuses de me parler,
et tous ces symboles qui refusent de se taire,
ce pourrait être un autre pays, mais non : c’est ici,
et ailleurs, ce serait le même ;
il y a si longtemps (ce me semble) si longtemps que je ne t’ai pas dit
je t’aime.
Et pourtant, et pourtant, la porte vient de claquer,
à l’instant.