Pourquoi est-ce que tout le monde a tendance à penser que la vérité est unique ? Hier soir, en parlant de Bukowski avec Nelly, on se disait qu’il y avait une grande vérité dans ses poèmes. Mais justement, si je dis qu’il y a une grande vérité dans ces poèmes, je n’ai pas envie qu’elle soit unique, au contraire, j’ai envie qu’elle soit multiple, je préférerais qu’il y en ait beaucoup comme lui, pas exactement comme lui, il est unique, mais avec cette même dose de vérité dans le sang, alors que le sang de tous est si pauvre en vérité, qui n’en veulent qu’une et une seule.
(Le sang, ici, est une image de l’écriture, métaphore encrière, rien de plus.)
Tu sais ce qu’une et une seule vérité fait de toi ? — Un analphabète.
Il faut une infinité de vérités. Il faut une vérité pour tout. Il faut une vérité pour tous.
Ce n’est pas un état des choses, la vérité, non, c’est un de ces états dans lequel tu te trouves quand tu te trouves parmi les choses.
C’est quoi ? et puis Pourquoi ? ce sont les premiers états de la vérité, ; — ils remontent à l’enfance. Mais ce n’est pas l’enfance de la vérité. S’il existe quelque chose comme l’essence et quelque chose comme la vérité, alors les questions sont l’essence de la vérité. Sinon, tant pis, c’est la même histoire.
Est-ce que je peux parler avec la bouche pleine ?
Hier soir, j’ai traduit le poème de Bukowski dont nous avions parlé au dîner, Nelly et moi :
l’homme sous le soleil
elle me lit le New Yorker
je ne l’achète pas, sais pas
d’où il sort, mais ça
parle de la Mafia
l’un des chefs de la Mafia
qui mangeait trop et se la coulait trop douce
trop de jolies femmes lui palpaient les
noix, et il a engraissé à force de sucer de bons
cigares et de jeunes nibards et il
a fait ces crises cardiaques — et puis
un jour quelqu’un le conduit
dans sa grosse voiture sur la route
et il ne se sent pas super bien
et il demande au jeune de s’arrêter et de le
faire descendre et le jeune le couche sur
le bas-côté sous un beau soleil.
je ne sais pas si c’est en Crète ou
en Sicile ou en Italie au juste
mais il est allongé là au soleil
et avant de mourir il dit :
comme la vie peut être belle, et
puis il meurt.
parfois il faut avoir tué 4 ou 5
mille hommes avant d’en venir
à croire que les moineaux
sont immortels, que l’argent c’est de la merde et
que tu n’as fait que perdre
ton temps.
Est-ce que les vérités se disent la bouche vide ?
Ta gueule.
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