3.5.20

Si après plusieurs milliers d’années d’organisation sociale et politique, les êtres humains ont toujours besoin de chef, à quoi en attribuer la raison ? Est-ce la nature de l’organisation politique qui exige un chef ? Ou bien y a-t-il des chances que les choses soient légèrement différentes ? Le manque d’autodiscipline, l’invocation de croyances magiques pour motiver le comportement, le défaut d’autonomie (au double sens de « se donner à soi-même sa propre loi » et « faire tout seul ce que je peux faire tout seul sans attendre que quelqu’un d’autre le fasse à ma place »), ne seraient-ce pas des raisons qui permettraient d’expliquer l’existence du chef, à la fois surveillant général et tortionnaire affectueux, alors qu’il est possible qu’elle n’ait rien de nécessaire, mais ne soit jamais que l’épiphénomène qui se produit systématiquement quand les gens décident non pas pour eux-mêmes, mais pour des raisons externes, de vivre leur vie ? Quelles sont les raisons que tu as de vivre ta vie ? Je ne sais pas. Parfois, je me dis que se poser la question, c’est mauvais signe, si on a besoin de raisons pour vivre, c’est probablement le symptôme exprimant que quelque chose ne va pas ? Sauf que si l’on ne s’interroge jamais, dans une sorte de vie végétative, est-on jamais conscient de vivre vraiment ? Souvent, je me suis dit qu’il vaudrait sans doute mieux que je n’aie pas conscience de vivre, mais je ne crois pas que j’ai réellement choisi cet état de choses, les choses se sont passées comme cela, formule floue évidemment, mais peut-être suis-je simplement né comme cela, et dès lors, il n’y a rien d’autre à faire que continuer, continuer par-dessus tout, jusqu’au bout. Pas gai aujourd’hui, depuis hier, en fait, pourtant il fait beau, mais le vent souffle, fort, depuis plusieurs jours, je n’aime pas ces jours qui me paraissent de plus en plus ineptes, inertes, dépourvus de tout intérêt. Bonne séance de course plus exercice ce matin, mais ce n’est pas le bon remède, pas en ce moment en tout cas, l’après-midi, Ulysses, mais ce n’est pas le bon remède non plus, certainement parce qu’il n’y a pas de bons remèdes tout court : une fois que le non-sens t’est tombé sous le sens, il n’y a rien à faire, sinon attendre que le sens se retourne et reprenne le dessus sur le non-sens, à supposer bien sûr que cela soit possible.

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