29.12.20

Sur la plage de sable fin que la tempête a vomis, rien que des cadavres de plastique. À considérer ce spectacle, l’idée de ramasser ces détritus qui jonchent le sol où le regard hésite à mettre les pieds semble dérisoire. À moins d’entendre se donner bonne conscience. Mais ce n’est pas ce que je désire. Qu’est-ce que je désire ? Regarder la réalité en face. Sur la route un peu plus tard, le regard humide de ce chien qui halète dans le coffre de la voiture de ses maîtres pourrait m’émouvoir. Le devrait-il ? J’y pense un instant. Et s’il est vrai que c’est ce que je vois de plus sincère sur ce trajet, cela ne constitue pas une raison suffisante de l’admirer. C’est là, en effet, et s’il retranche peut-être un peu de laideur à la laideur du monde, ce n’est pas ce que je recherche. Comme hier, introuvable. Alors pourquoi continuer ? Parce que, contrairement à mes contemporains qui se laissent dévorer par leurs désirs (ou, devrais-je dire, par leur unique désir), je n’ai pas envie de déserter la réalité, j’ai le désir d’aimer le monde. Le fait que cet amour ne trouve que rarement objet à sa mesure est une objection, c’est vrai. Mais qui a dit que je voulais renoncer à mes désirs ? Je ne veux pas confondre mes désirs avec la réalité ; — la perfection n’est pas donnée, c’est quelque chose qui se fait, dans le temps, le long temps. Voilà la différence. Je cherche quelque chose d’introuvable. Sans renoncer à le fabriquer de toutes pièces, phrase après phrase. Un  bâti qui se débat avec l’absurdité des désirs des autres, ceux qu’on dit mes semblables, et que je ne reconnais pas. Je suis seul. Mais y a-t-il une autre solution que la solution de continuité ?