13.5.21

Que dire du jour et de la nuit, du néant et de l’ennui ? L’enfant pleure pour quelque chose que nous ne comprenons que trop mal et nos consolations ne sont rien, sinon que des mensonges, manières de détourner l’attention. La sienne. La nôtre. Que faisons-nous d’autre ? Trop de vent sur la jetée. Les vagues par le vent poussées toujours vers l’écrasement ne lècheraient pas nos pieds mais les submergeraient. D’où son désir frustré. Qui ne saurait l’entendre ? Nous faisons semblant. Tout le temps. Comment faire autrement ? Je regarde un tableau et semble m’enfoncer plus profondément que jamais dans un espace qui m’ignore et où, pourtant, je me sens chez moi. Où est-ce ? Nulle part. Assurément. Je me fais des promesses que je ne tiens pas et ne sais si je me déteste, par suite, de ne les tenir ou de me les être faites. Et dire que je suis le seul à pouvoir me répondre. Silence. Dans les colonnes quotidiennes, que de la mort bien saine. On imagine des reporters de guerre le teint frais, prendre un air grave, face caméra. Et comment ne le feraient-ils pas ? Tant qu’on parle, c’est toujours l’autre qui meurt. On se cache derrière des réflexes ou, à bout de souffle, des détournements de l’idiome dans lequel on a le malheur de s’exprimer. Mais rien ne masque tant les choses que cette attitude si triste qui consiste à parler sans cesse. Les différences s’estompent — c’est souvent le cas — devant notre éternelle passion pour le bavardage universel. Trop de vent dans l’air. Trop de soleil, par conséquent. J’ai la sensation d’avoir le cerveau grillé derrière le visage, brûlé par le temps qu’il fait. Je tire les paupières vers le haut afin d’essayer d’y voir clair. Est-ce sérieux ? Aujourd’hui, demain, hier, quelle différence cela fait ? Dans mon cahier, je note les dates de peinture des tableaux. Et me dis : que faire de tout ce temps écoulé ? Quoi d’autre sinon cela même que je fais ?