Pouvoir chanter encore,
ne serait-ce pas une grande joie ?
Pouvoir chanter encore
et chanter que je chante,
chanter je chante,
ne serait-ce pas une grande joie,
et redoublée du chant de mon chant ?
Mon chant du chant :
hors d’exuvie, nymphe plus que nymphe — en vie.
Au lieu de quoi, au lieu de joie,
chaque jour réduit le silence à la peine.
Disgrâce de toute éternité. Perpétuité.
Murs dressés contre les soleils de nos rivages.
Tous gris, pas un mot qui sauve,
doutes en formes de neutres,
déclinaison,
liturgie de la léthargie.
Cymbales tues au bout de la mue,
toute-puissance du e muet,
licence politique,
où encore rime avec mort,
comme terreur rima avec erreur.
Pouvoir chanter encore,
même sans rien dire, vocalises
où un souffle d’air annonce un souffle d’air,
quand, au bout de l’histoire,
blessures lyriques,
insultes faites à mon chant,
ne résonnent plus qu’hurlements des machines
à la conquête du monde.
À ma grande joie,
pourrais-je chanter encore ?
Temps gris, puis pluie. Dans le parc où je vais courir en ce dimanche matin, rassemblement folklorique de hordes alcooliques. Au prétexte d’amusement, tous les ans, on annexe les lieux publics, installe buvettes où faire griller saucisses. Tournant autour, je n’aurai qu’une envie : fuir. Quelle autre attitude adopter ? Un peu plus tard, j’écrirai une sorte de déploration sur le silence du chant. Ayant mal dormi cette nuit où, après avoir regardé quelques épisodes d’une ignoble série pour lutter contre la fatigue, j’ai cherché en vain un peu d’air, il me semble que c’est tout ce que puis faire. Plus de pluie, ciel gris en forme d’éclaircie.

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