Dormirais-je cent ans, au réveil, quelques heures de sommeil manqueraient encore. D’où cette idée, qui me vient à l’instant, d’écrire un roman sur quelqu’un qui dort, mais pas comme une métaphore, ce que serait quelque chose comme le roman de Perec, ni comme Warhol filmant son amant John Giorno en train de dormir dans Sleep, non, dans une littéralité paradoxale, en quelque sorte, car, c’est bien tout ce que fait quelqu’un qui dort : rêver. Survolé hier, les quelque cent pages qui composent un texte commencé le 24 décembre 2013, à Gênes, précisément, et que j’ai finalement abandonné pour des Monstres littéraires. Dans ce texte, je retrouve une grande partie des thèmes que j’ai développés ensuite dans mes autres livres, habitacles compris, et je me dis que, pour montrer cette grande cohérence, il faudrait que je reprenne ce texte, non pour en changer la forme, mais pour l’actualiser : sa préface, notamment, ne me semble plus convenir, et le titre non plus, d’autres choses en outre, qu’il faudrait voir dans le détail. Et ce, en viens-je à me demander, et ce, indépendamment du dégoût que t’inspire l’idée de faire une œuvre ? C’est ce que j’ai ressenti, du dégoût, en effet, voyant ce célèbre avocat militant (peu importe son nom, il n’est qu’une incarnation de plus d’un type universel) jouer au romancier en répondant aux questions de la starlette (idem) qui joue à la journaliste, alors même que c’est faux, qu’il ment, que publier un roman chez un éditeur dont on défend par ailleurs les intérêts ne fait pas de soi un romancier, mais rien ne peut s’opposer au mensonge, dans notre époque de cynisme et d’opportunisme, parce que la vérité ne s’oppose pas au mensonge, la vérité est contenue dans le mensonge. Dégoût face à ce visage souriant, entendant le ton plein de certitude de celui qui jouit de la plénitude de sa bonne conscience, dégoût devant cette image inlassablement reproduite de l’aliénation. Je l’entends qui dit : « c’est ma vision de romancier », et il ment, il raconte n’importe quoi, mais le démasquer renforce sa supériorité, tout finit par être intégré en un seul continuum, le vrai, le faux, le mensonge, la vérité, il n’y a pas plus aucune différence entre ces abstractions confondues au sein d’un même règne, l’argent. Je bâille. Je ne ressens pas la moindre colère. Rien que l’envie de dormir une heure de plus, de me réveiller le plus tard possible, de ne plus rien penser, de garder les yeux fermés, de rêver.

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