Trouver un endroit où vivre. Mais tout est trop ou tout n’est pas assez. Je ne préjuge pas de qui l’est ou qui ne l’est, si c’est le monde ou moi, les deux ou personne. Dont la vie s’écoule au gré des hésitations entre une vie possible et une autre, telle forme de vie et telle autre. Passé la journée dans une voiture, à rouler, traversé une partie de la France comme ça, pour voir. Le charme exaspérant des aires d’autoroute. Toute une civilisation là, dans la chair et les os de ses usagers plus ou moins libres, plus ou moins fous, qui s’en viennent consumer l’existence comme des papillons aveugles. Elle masque mal, pourtant, la civilisation, le cul de la vache qui s’abrite du soleil à l’ombre d’un arbre, comme nous, mais de l’autre côté du parking. Qu’est-ce qui sépare le monde moderne de la campagne d’autrefois : dix mètres ? Même pas. Et pourtant, tout est là, dans cette frontière étique entre ici et ailleurs, aujourd’hui et autrefois. Qui la parcourrait, cette frontière, parcourrait le destin du monde, mais c’est trop loin, c’est trop peu, c’est fatigant, on n’est pas là pour ça, surtout pas moi. Je contemple la face que la vache me présente quelques instants et puis m’en vais assouvir d’autres besoins. Remplir et vider, automates primitifs à 130 kilomètres à l’heure, vitesse maximale autorisée. Je ne préjuge ni ne juge, j’essaie de comprendre quelque chose. À quoi ? Je ne sais pas. Perfection insignifiante du ciel bleu. Le regard s’attarde le temps d’un clin d’œil sur un vallon, quelques jeunes chevaux, un château. Une rangée d’éoliennes surgit derrière une colline. Et pourtant, elles ne tournent pas. Les révolutions se suivent et ne se ressemblent pas. Du mouvement et du repos. Ainsi va l’univers. Consignes de sécurité. Radars de contrôle. Impression que tout se déroule dans une sorte d’indifférente inconsciente. On ne sait plus que penser, sinon que le café est mauvais. Épiphanie bâtarde. Rêves télévisés. Des hommes torse nu exhibent leur embonpoint comme on ne dit plus. Parfois, j’ai l’impression que je ne sais rien dire que du mal. Mais sur quoi, me dis-je en guise d’objection, sur quoi dire du bien ?

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