L’avenir, c’est ce dont nous n’avons pas besoin. Me suis-je dit après que j’eus été exposé une fois de plus à une publicité indésirable, indésirée. Éneplusunième viol mental auquel nous nous soumettons comme les parfaites petites bonnes consciences que nous sommes, nous qui passons notre temps à dénoncer au nom de grands principes moraux ces innombrables diversions mises en circulation pour laisser passer inaperçue l’immense domination dont nous sommes tous les victimes. (Phrase trop longue, trop prétentieuse, nécessaire de reprendre sa respiration.) Ce qui m’était tombé sous les yeux, c’était la publicité d’une marque qui vantait les mérites de son téléphone (dé)pliable dans un mémorable Witz postindustriel : « Le futur s’ouvre à vous. » Mon Dieu, quelle débilité ! me suis-je fait remarquer, mais il était déjà trop tard : j’avais déjà été exposé. J’avais déjà été exposé à l’avenir, et cet avenir était indésirable. Alors, je me suis demandé : Quel autre avenir pourrait-il être désirable ? Et j’ai passé en revue ceux qui nous sont proposés ces temps-ci, promotion faite de manière d’autant plus intensive que nous sommes en période préélectorale, et je me suis répondu le plus simplement du monde : Aucun. Aucun avenir n’est désirable. Et pourtant, l’avenir se produira. Et pourtant, il a déjà eu lieu. Des milliards de milliards de fois. Que l’avenir ne soit pas désirable, cela ne signifie pas, du moins pas pour moi, cela ne signifie pas que je trouve que la vie ne mérite pas d’être vécue, que je suis las du monde ou je ne sais trop quoi. Non, simplement que, si je passe en revue l’étendue de mes désirs, et dieu sait s’il y en a, je ne trouve pas parmi eux ceux que ce monde social me propose. Le monde social propose à mon désir des futurs dont je ne veux pas. Hier, j’ai fini le ∆ de ruissellements. Assez fascinant de voir comment l’esprit fonctionne, sa plasticité, comment, alors que j’avais pensé la veille (avant-hier, donc) qu’il fallait que je termine cette partie (je visualisais les différents chantiers qui sont les miens en ce moment en réponse à l’idée que je me fais que je ne fais rien), au moment opportun, il s’est tourné vers ce texte (traduction : j’ai ouvert le fichier) et, tout de suite, j’ai retrouvé le mouvement, le rythme, la musique qui est celle de ce texte, comme si je l’avais commencé la veille alors que, de fait, cela fait des mois qu’il attend que quelque chose se passe. Restent encore trois parties à écrire (E, Z, H) et puis il me faudra reprendre l’ensemble, trouver un titre dont ruissellements deviendra le sous-titre. 421 x 7 = 2947.

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