26.9.22

« Un jour, je pourrai me reposer » n’est la réponse à aucune de tes questions. Premièrement, parce qu’est présupposée une distinction entre le repos et le mouvement qui ne va pas de soi, même les mots « mouvement » et « repos » devant être considérés avec la plus grande des suspicions. Ils présupposent tous deux une identité introuvable. Deuxièmement, parce que cette phrase, tu ne te la dis jamais que lorsque tu te penses en mouvement tandis que, quand tu te penses au repos, tu penses à te mettre en mouvement, en sorte que tu n’es jamais où tu te sens être, toujours là où tu te projettes, faute d’imaginer quelque chose de mieux. Troisièmement, tu supposes, ce faisant, qu’un jour toutes les questions auront reçu une réponse, comme si l’état actuel du monde était son état définitif, car s’il ne l’est pas, contrairement à ce que tu supposes, des événements toujours nouveaux se produiront charriant avec eux leur lot d’innombrables je ne sais pas, des doutes, des questions, des problèmes, de l’incertitude, de l’indétermination, de la vie, en bref. Car, quatrièmement, et peut-être est-ce le dernièrement, ce que tu t’imagines quand tu t’imagines qu’un jour tu trouveras le repos, c’est une mort sans mort. Peut-être que la vie et la mort ne sont pas si strictement opposées que nous n’avons appris à l’admettre, mais vider la chose de sa substance et continuer de l’appeler cette chose, c’est perdre le sens de parler. Nombreux qui veulent te faire perdre le sens de parler. Par bienveillance, dit-on ; pour prendre le pouvoir, faut-il comprendre. Quand je dis qu’il faut en finir avec le pouvoir, je ne dis pas qu’il faut trouver le repos, mais qu’il faut inventer une autre façon de penser le monde et d’y agir. La paix, conçue comme non-guerre, maintient les conditions de la guerre qu’elle suspend temporairement. Ni paix ni guerre, ni mouvement ni repos : autrement le monde.