28.8.22

Sorte de crise de nerfs dans la nuit qui m’informe que les cartons pleins sont plus durs que mes pieds nus. Est-ce vraiment une révélation ? On n’apprend rien. Jamais. La douleur me calme, cependant, conscient qu’elle me rend de l’absurdité de mon comportement. Non qu’il soit absolument infondé, il y a toujours des causes, des raisons, c’est indiscutable, parfois on perd même son temps à les chercher, mais la réponse que j’apporte au monde n’est pas appropriée. Peut-être n’y a-t-il pas de réponse appropriée ? N’est-ce pas ce qui rend les gens fous : toujours chercher quelque chose à faire quand il n’y a rien à faire ? Comme si nous avions besoin d’agir en permanence, ou plutôt : d’être agissant, — pour nous prouver que nous existons. Mais existons-nous vraiment ? Non, mieux : avons-nous toujours besoin d’exister ? Nous sommes pour autant que nous sommes vivants, mais sans mettre un terme à la vie même par le suicide, ne sommes-nous pas en mesure de mettre des termes périodiques à l’existence, mettre l’existence entre parenthèses, ou plus justement peut-être (je cherche mes mots en les écrivant) : nous court-circuiter de l’existence, y renoncer sans faire rien de spécial (du yoga, de la méditation, ou je ne sais trop quoi d’exotique, de moins en moins exotique), en sortant simplement du cours de l’existence ? Dans la nuit de l’appartement, je tournais en rond pour trouver le bon endroit où être, mais ce bon endroit n’existait pas, ce n’était pas une question de place, de position, de lieu, c’était une question de disposition de moi-même, voire : de disparition de moi-même. Être en vie n’est pas toujours indispensable, ce fait se révèle quand nous nous efforçons de nous mettre en conformité avec cet être en vie par l’existence, par la manifestation de notre existence (manifestation qui se destine à soi-même aussi bien qu’aux autres), mais c’est en vain, c’est peine perdue, il n’y a rien à faire parce qu’il n’y a rien du tout. Ce négatif, il faut l’accepter comme une réalité temporaire et inévitable. De temps à autre, regardant le ciel ou la météo sur internet, cette idée qui devient chaque jour de moins en moins étrange : il ne pleuvra plus jamais.